Procès sur la catastrophe AZF Toulouse du 21 septembre 2001
AUDIENCE DE CASSATION
Vers un troisième procès.
L'audience de cassation d'AZF s'est tenue ce jeudi 30 octobre. Malgré le peu de place disponibles pour le public, Daniel Montaron a pu assister à cette audience. En voici le compte-rendu.
Paris. Palais de Justice.
L'audience de cassation d'AZF s'est tenue aujourd'hui jeudi 30 octobre. Elle a durée quatre heures. Beaucoup de juristes se trouvaient dans la grande salle de la cour criminelle, la cour de cassation est au grand complet, mais seule une portion congrue d'une quarantaine de places était disponible pour le public.
Dans le public, nous avons noté la présence d’avocats (en cassation, ce sont les avoués qui prennent la parole, les avocats sont donc relégués dans le public) : Maître Jacques Monferran, Maître Daniel Soulez Larivière, Maître Mauricia Courrège, Maître Laurent de Caunes, Maitre Stella Bisseuil; beaucoup de membres de Total, notamment Patrick Timbart et Jean-Jacques Guibault; de Daniel Grasset PDG de Grande Paroisse; de parties civiles : Monique Mauzac, Jacques Mignard président de Mémoire et Solidarité, Jean-François Grelier président de l'Association des sinitrés du 21 septembre 2001, les époux Vitry; et peu de presse : un représentant de l'AFP et Juliette Meurin et Jean-Pierre Duntze pour France 3 Toulouse.
Après un rappel des faits et des procès, le Président donne la parole aux avoués des parties ayant déposées un pourvoi en cassation.
Thomas Lyon-Caen, pour Serge Biechlin et Grande paroisse, soulève dans sa plaidoirie deux moyens de cassation : l'impartialité de la juge Maryse Le Men Regnier et la non motivation de l'arrêt condamnant ses clients du chef de de destruction, dégradations ou détériorations involontaires de biens appartenant
à autrui.
Avis de l'Avocat Général
Succédant aux parties, Maître François Cordier, Avocat Général, donne son avis. Il rejette les demandes de cassation formulées par M Grelier, Madame Mauzac et Mémoire et Solidarité. Pour le premier qui demandait la condamnation de Total, il rappelle que cette société a bénéficiée d’un non lieu implicite. Pour les seconds, il argue d’un défaut de qualité à agir estimant que les parties civiles ne peuvent se pourvoir que sur la condamnation ou non des accusés.Puis il débat longuement de la question de l'impartialité de La juge Maryse Le Men Reigner qu'il considère comme « le point central et essentiel de ce procès en cassation ». Il fonde son avis sur plusieurs décisions de la Cour européenne. Sans doute peut-on y voir une volonté d'harmoniser notre droit avec celui de Bruxelles à moins qu'il s'agisse de prévenir toute velléité de la défense de porter l'affaire devant la Cour européenne... La juge Maryse Le Men Reigner était vice-présidente d'une association d'aide aux victimes en contrat avec une fédération elle-même partie civile au procès et à laquelle la Cour a alloué des indemnités ! Mme Maryse Le Men Reigner qui ne pouvait se retirer d'elle-même a demandé son retrait au Premier Président de la Cour d'Appel de Toulouse qui l'a refusé. Ce constatant, M François Cordier déclare : « Je ne peux que regretter que le débat réalisé en interne n'ait pas été porté à l'ensemble des parties. » Il estime donc fondé le moyen porté sur l'absence de partialité. L'Avocat Général avoue avoir longuement hésité et varié quant à sa position. Selon lui, la situation est, de prime abord, incompatible avec la participation de la juge à la Cour. Mais il affirme que l'appartenance de la magistrate à un syndicat qui n'avait pas d'intérêts dans ce procès, ne permet pas de remettre en cause son impartialité. Il propose donc de rejeter ce moyen estimant « non justifiées les craintes de Serge Biechlin ».
Concernant le second moyen de cassation invoqué par le directeur de l'usine Grande Paroisse, l'Avocat Général constate que la Cour qui a condamné Serge Biechlin pour "destruction, dégradations ou détériorations involontaires de biens appartenant à autrui" n'a pas motivé son arrêt, ni fait référence à aucun éléments d'obligations légales ou réglementaires de portée générale comme l'exige la loi. Il estime donc inéluctable une cassation sur ce point.
En conclusion, le représentant du Ministère Public a suggéré une cassation partielle de l'arrêt AZF ouvrant de nouveaux débats sur les culpabilités, les peines et les indemnités du chef de dégradations involontaires de biens d'autrui.
Un troisième procès AZF en vue !
Si l’avis de l’Avocat Général était suivi par la Cour, un nouveau procès aurait lieu, ne concernant que la partie dégradations involontaires de biens d’autrui. La culpabilité de l’usine AZF et de son directeur du chef d’homicide involontaire deviendrait alors définitive. Les culpabilités, peines et indemnisations seraient rediscutées. Et la théorie expertale d’une explosion par la rencontre de deux produits incompatibles (en fait il en faut 3) serait définitivement entérinée.
Arrêt le 13 janvier 2015.
Daniel Montaron
30 octobre 201413 janvier 2015 -->>> Décision : la Cour de Cassation annule le procès en appel.